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La Sleeve de Nadou - Que du Bonheur -
24 décembre 2016

Bibliothèque - LES MOTS POUR LE DIRE de Marie CARDINAL -

 

                                                    LES MOTS POUR LE DIRE de Marie CARDINAL  

 

      Coup de coeur                                              

                                                  

Les Mots pour le dire est un roman autobiographique de Marie Cardinal paru en 1976, décrivant sa psychanalyse

 

                                                  Résultat de recherche d'images pour  Marie CARDINAL 

 

Marie CARDINAL (née Simone Odette Marie-Thérèse Cardinal)

est une romancière française (3 mars 19281 - 9 mai 2001 à Valréas).

Sœur du réalisateur Pierre Cardinal, elle naît pied-noir à Alger.

Licenciée en philosophie à Paris en 1948, elle obtient son diplôme d'études supérieures de philosophie sur Philon d'Alexandrie, puis décide de préparer l'agrégation, études qu'elle interrompra après son mariage en 1953 avec Jean-Pierre Ronfard, metteur en scène et comédien de théâtre.

Jean-Pierre et Marie auront trois enfants : Alice, Benoît et Bénédicte.

De 1953 à 1960, elle enseigne la philosophie, à SaloniqueLisbonneVienne et Montréal, puis met un terme à sa carrière professorale pour se tourner vers le journalisme, collaborant à différents hebdomadaires tels que L'Express ou encore Elle.

Elle a été à l'initiative de la création du Syndicat des écrivains de langue française et en fut présidente honoraire à vie.

Elle est inhumée au cimetière de Malaucène (Vaucluse). 

 

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     Adaptation au cinéma   _____________________________________________

Les Mots pour le dire est aussi un film de 1983, tiré de ce roman par le réalisateur français José Pinheiro, avec Nicole GarciaClaude Rich et Daniel Mesguich.                                                                                          

                                                                

      Critique           _____________________________________________________ 

La jeune femme que nous découvrons dans Les Mots pour le dire est un être physiquement et moralement désemparé, au bord de la folie. Jusqu’au jour où elle se décide à confier son destin à un psychanalyste. Il s’agit ici d’un cas vécu, particulièrement pénible. Fasciné, le lecteur subit la puissance de ce livre où se manifestent le tempérament d’une femme et le talent d’un écrivain. Cet ouvrage a obtenu le prix Littré 1976. - Le Livre de Poche -

 

      Résumé          ____________________________________________________

L’auteur parle de sa maladie qu’elle nomme « la chose », qui se manifeste par un écoulement de sang récurrent (assimilable à des règles). Cela génère de la honte et fait parfois flirter l’auteur avec la folie : elle a des hallucinations.

Les médecins qu’elle consulte n’arrivent pas à la soigner, ou alors c’est la politique du pire, soit un utérus fibromateux à opérer en urgence. Une opération qu’elle refuse de subir. Elle verra finalement un psychanalyste durant sept ans et trois fois par semaine.

Ce voyage intérieur lui permettra de se remémorer les événements traumatisants de son enfance alors qu’elle vivait dans une ferme à Alger. La séparation de ses parents, la tuberculose qui fera mourir sa sœur et son père, son éducation par une mère tyrannique et froide. Cette quête du sens l'aidera à comprendre l’importance du langage, de trouver « les mots pour le dire » afin de réparer certains de ses maux.

 

      Extraits            ____________________________________________________

"A l'heure dite j'étais au fond de l'impasse, toute empaquetée de serviettes, de coton, engoncée dans des sortes de couches que je m'étais fabriquées. J'ai attendu un peu parce que j'étais arrivée en avance. La personne avant moi est sortie. Comme la veille j'ai entendu les ouvertures et les fermetures des deux portes. Enfin je suis entrée et j'ai dit tout de suite : 
« Docteur, je suis exsangue. »
Je me souviens très bien avoir employé ce mot parce que je le trouvais beau. Je me souviens aussi que je voulais avoir un visage et une attitude pathétiques. Le docteur m’a répondu doucement et calmement :
« Ce sont des troubles psychosomatiques, cela ne m’intéresse pas. Parlez-moi d’autre chose. »
Il y avait là ce divan que je ne voulais pas employer. Je voulais rester debout et me battre. Les mots que cet homme venait de prononcer m’avaient giflée en pleine face, jamais je n’avais rien encaissé de si violent. En pleine figure ! Mon sang ne l’intéressait pas ! Alors tout était détruit ! J’en étais suffoquée, foudroyée. Il ne voulais pas que je parle de mon sang ! Mais de quoi d’autre voulait-il que je parle ? de quoi ? En dehors de mon sang il n’y avait que la peur, rien d’autre, et je ne pouvais pas en parler, je ne pouvais même pas y penser.
Je me suis effondrée et j’ai pleuré". 

                                ____________________________________________________

"Entre le bidet et la baignoire, c'était là qu'elle était le mieux quand elle n'arrivait plus à maîtriser la chose intérieure. C'était là qu'elle se cachait en attendant que les remèdes fassent leur effet. Recroquevillée, les talons contre les fesses, les bras serrant fort les genoux contre la poitrine, les ongles si enfoncés dans les paumes de ses mains qu'ils avaient fini par y creuser des plaies, la tête ballottant d'avant en arrière ou sur les côtés, trop lourde, le sang et la transpiration qui coulaient. La chose qui, à l'intérieur, était faite d'un monstrueux grouillement d'images, de sons, d'odeurs projetés en tous sens par une pulsion dévastatrice rendant tout raisonnement incohérent, toute explication absurde, toute tentative de mise en ordre inutile, se révélait, à l'extérieur, par des secousse intenses et une sueur nauséabonde".

                                ____________________________________________________

"Moi qui n’avais pas pu pleurer depuis si longtemps moi qui cherchais en vain depuis tant de mois le soulagement des larmes, voilà qu’elles coulaient enfin par grosses gouttes qui détendaient mon dos, mon torse, mes épaules. J’ai pleuré pendant longtemps. Je me vautrais dans cet orage, je le laissais prendre mes bras, ma nuque, mes poings serrés, mes jambes repliées sur mon ventre. Depuis combien de temps n’avais-je pas éprouvé le doux calme du chagrin ? Depuis combien de temps n’avais-je pas laissé mon visage barboter dans la tendresse des larmes mêlées d’un peu de salive et de morve ? Depuis combien de temps n’avais-je pas senti couler la gentille liqueur tiède de la peine ?
J’étais bien là, comme un enfant repu dans son berceau, les lèvres encore pleine de lait, envahi par la torpeur de la digestion, protégé par le regard de sa mère. J’étais allongée sur le dos, des tout mon long, obéissante, confiante. Je me suis mise à parler de mon angoisse et j’ai deviné que j’allais en parler longtemps, pendant des années. J’ai senti dans le fin fond de moi que j’allais peut-être trouver le moyen de tuer la chose". 

                                 ____________________________________________________

"L'oubli est la plus compliquée des serrures mais il n'est qu'une serrure, il n'est pas une gomme ou une épée, il n'efface pas, ne tue pas, il enferme. Je sais maintenant que l'esprit capte tout, range tout et entretient tout...Même ce que je crois ne pas avoir vu, entendu ou senti, même ce que je crois ne pas avoir compris, même l'esprit des autres. Chaque évènement aussi minuscule soit-il, quotidien... est catalogué, étiqueté, serré dans l'oubli mais indiqué dans la conscience par un signal souvent microscopique : une brindille d'odeur, une étincelle de couleur, un clignement de lumière...un éclat de mot...un frôlement, un écho... un rien qui existerait".

                                 ____________________________________________________

"C'est que je n'avais plus aucune prise sur moi-même. J'étais personne. Je n'avais pas de désirs, pas de volonté, pas de goût, pas de dégoût. J'avais été entièrement façonnée pour ressembler le plus possible à un modèle humain que je n'avais pas choisi et qui ne me convenait pas. Jour après jour, depuis ma naissance, on avait fabriqué : mes gestes, mes attitudes, mon vocabulaire. On avait réprimé mes besoins, mes envies, mes élans, on les avait endigués, maquillés, déguisés, emprisonnés. Après m'avoir décervelée, après avoir vidé mon crâne de moi, on l'avait bourré de la pensée adéquate qui m'allait comme un tablier à une vache. Et quand il s'est avéré que la greffe avait bien pris, que je n'avais plus besoin de personne pour refouler les vagues qui venaient du tréfonds de ma personne, on m'a laissée vivre, librement".

                                 ____________________________________________________

"Peut-être que c'était ça l'arme contre la chose : ce flot de mots, ce maelström de mots, cette masse de mots, cet ouragan de mots ! Les mots charriaient la méfiance, la peur, l'incompréhension, la rigueur, la volonté, l'ordre, la loi, la discipline et aussi la tendresse, la douceur, l'amour, la chaleur, la liberté".

                                ____________________________________________________

"Je comprenais que les mots pouvaient être mes alliés ou mes ennemis mais que, de toute manière, ils m'étaient étrangers. Ils étaient des outils façonnés depuis longtemps et mis à ma disposition pour communiquer avec les autres. Le docteur et moi nous nous étions fabriqué un petit vocabulaire d'une dizaine de mots qui, pour nous deux, englobaient toute ma vie. Les hommes avaient inventé des millions de mots tous aussi importants que ceux que nous utilisions dans l'impasse et qui exprimaient l'univers dans sa totalité. Je n'avais jamais pensé à cela, je ne m'étais jamais rendu compte que tout échange de paroles était un fait précieux, représentait un choix. Les mots étaient des étuis, ils contenaient tous une matière vitale.
Les mots pouvaient être des véhicules inoffensifs, des autos tamponneuses multicolores qui s'entrechoquaient dans la vie quotidienne, faisant jaillir des gerbes d'étincelles qui ne blessaient pas.
Les mots pouvaient être des particules vibratiles animant constamment l'existence, ou des cellules se phagocytant, ou des globules se liguant pour avaler goulûment des microbes et repousser les invasions étrangères.
Les mots pouvaient être des blessures ou des cicatrices de blessure, ils pouvaient ressembler à une dent gâtée dans un sourire de plaisir.
Les mots pouvaient aussi être des géants, des rocs profondément enfoncés dans la terre, solides, et grâce auxquels on franchissait des rapides.
Les mots pouvaient enfin être des monstres, les S.S. de l'inconscient, refoulant la pensée des vivants dans les prisons de l'oubli".

                                ____________________________________________________

 

 

 

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La Sleeve de Nadou - Que du Bonheur -
  • Comment vous parler d'une décision qui a pris tant d'années avant d'être prise! Sans tabous, ni retenues aucunes, je vous emmène sur le chemin de ma Sleeve qui a eu lieu le 05/12/2016. Oui, mais! allez-vous me dire! C'est si récent! Qu'en dire! Suivez-moi
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